Un papa semble débordé avec ses filles. Il y a beaucoup d’agitation, et après plusieurs minutes où la tension monte, il se tourne vers ses deux plus grandes et leur dit : « Vous êtes comme votre mère, construites pour me pourrir la vie. » Observateur impuissant, je ne sais évidemment rien de la vie de cet homme, de ce qu’il a peut-être vécu, de ce qu’il traverse. Mais la situation me fait réfléchir aux intentions que l’on prête à autrui ainsi qu’au fait de prendre les choses personnellement.
Prendre ce qui nous arrive comme si cela nous était destiné est la norme pour la plupart d’entre nous, c’est juste “normal” et, pourtant, cela nous conduit à beaucoup de souffrance. Ce qui nous touche le plus dans une relation difficile, c’est en général l’interprétation que nous faisons des mots et du comportement de l’autre : il nous en veut, elle nous provoque, ils le font exprès…
Nous avons l’impression que la personne agit pour nous contrarier. En pensant ainsi, automatiquement, nous sommes poussés à “réagir” pour riposter, nous défendre.
J’ai remarqué qu’avec ma fille de 4 ans les choses étaient plus simples, car avec un petit enfant il est plus facile de ne pas prendre les choses personnellement. J’essaie de me rappeler que lorsqu’elle est agitée et qu’elle me dit, par exemple : « Papa, tu es méchant, tu n’es plus mon papa », cela n’a rien à voir avec moi en fait. Peut-être a-t-elle eu une journée difficile, vécu des émotions. Je peux alors tenter de ne pas accorder de crédit à la remarque elle-même.
Cela me donne la mesure de la sagesse qu’il me reste à acquérir dans mes relations avec les plus grands !
Une piste pourrait être d’appliquer avec eux ce qui nous vient plus naturellement avec les enfants : essayer, plutôt que d’être centré sur moi, de tourner mon attention vers l’autre. De me poser par exemple la question de ce que ces paroles et attitudes disent de la personne, et non de moi finalement ! Cela me permettrait non seulement de ne pas réagir mais peut-être aussi de résonner en empathie.
Nous rendre compte que la plupart des choses qui auparavant nous irritaient n’ont en réalité rien à voir avec nous, voilà une manière de retrouver de l’espace et donc de la liberté dans nos vies. Une liberté que nous pouvons mettre au service de ce qui est vraiment important : prendre soin de ce qui nous est cher, défendre ce qui est précieux, savourer ce qui est bénéfique… En découlera une forme de simplicité et de spontanéité au service de plus de fluidité et de joie dans nos relations.
Auteur de plusieurs ouvrages sur les émotions et la psychologie positive, passionné par l’humain et par la richesse que donnent à nos vies les émotions, Ilios Kotsou partage avec nous sur les thèmes qui lui sont chers.