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Garder son calme pour mieux vivre son écoanxiété

Catégorie(s) : Bien-être, Art de vivre, À découvrir, Rituels, Développement personnel

Tout nous pousse à l’agitation, en permanence. Des sollicitations, toujours plus nombreuses, plus intenses, plus attirantes, dont la consommation s’apparente vite à des addictions. Regarder un film tout en jouant sur sa tablette, tenir une conversation tout en travaillant sur son ordinateur, jardiner tout en écoutant les informations… Longue est la liste de ces actions menées en parallèle, empilées les unes sur les autres, excitant notre esprit, devenant anxiogènes, et nous faisant perdre notre calme. Un calme qu’il serait judicieux de retrouver et de garder, pour mieux vivre notre monde actuel.

J’aime la musique.

J’en écoute régulièrement, depuis toujours. Au volant de ma voiture. En bricolant. En faisant la cuisine. En marchant. En swipant sur l’écran de mon portable. En écrivant, aussi.

Lors d’un trajet en bus, il y a de ça quelques années, une envie me prend. Pas nouvelle, mais oubliée depuis longtemps. Écouter de la musique, sans rien faire d’autre. Je mets mon casque, ferme les yeux et me laisse envahir par les mélodies, les voix, les orchestrations. Je me concentre sur un texte, un instrument, un son particulier caché au milieu des arrangements. Je réécoute, pour comprendre pourquoi j’aime certaines chansons et moins les suivantes, pourquoi une mesure me fait sortir de ma transe, pourquoi certains accords me pénètrent plus que d’autres. Soudain, ces musiques que j’écoute pour certaines depuis des lustres prennent une autre dimension, alors qu’elles restent les mêmes. De ce moment consacré uniquement à la musique, sans aucune pollution extérieure, je ressors heureux, apaisé, enrichi. Calmé. Un plaisir simple et intense, devenu rare depuis l’avènement de notre société de la sollicitation. Depuis, je réitère fréquemment cette pratique, toujours avec les mêmes effets bénéfiques.

Faire une seule chose à la fois calme mes trépidations existentielles.

Fait taire ce monkey talk cher à Eckhart Tolle, apôtre de l’instant présent. Cette petite voix intérieure du primate qui sommeille en moi et se réveille trop souvent. Un petit démon qui aime créer confusion et agitation dans mon esprit.

Se concentrer sur une seule action constitue un bienfait pour mon être entier.

Être à ce que je fais, comme disait ma défunte grand-mère.

C’est aussi un remède à mon écoanxiété.

Cet adversaire pourtant coriace, me rendant à la fois victime et coupable. Victime, par conscience de devoir subir de plus en plus les conséquences de nos abus, à mon petit niveau, dans les années à venir. Coupable, par acceptation de ma part de responsabilité, de la nôtre, collectivement. Une situation inconfortable, coincé entre le marteau et l’enclume.

L’action est le meilleur anxiolytique contre l’écoanxiété, certes, mais pas le seul. Je tente également de trouver une cohérence dans mon quotidien, une harmonie entre mes pensées, mes paroles et mes actes, pour engendrer un sentiment bénéfique d’avancer dans la bonne direction. Garder mon calme y participe. Pour repousser une sensation incontrôlable de panique qui ne résoudra rien, qui rendra tout plus difficile. Le calme et sa capacité concrète à produire un effet tache d’huile. En conservant mon calme, en le cultivant, j’influence mon entourage à devenir, à redevenir ou à rester calme. Une boucle vertueuse qui m’aidera à mieux vivre les épreuves au quotidien, qui nous permettra peut-être collectivement de prendre de meilleures décisions, plus justes, plus engagées, plus efficaces.

Se calmer, aussi, pour profiter pleinement des bienfaits d’activités apaisantes.

Marcher pieds nus dans l’herbe.

Un acte caricatural, stérile, voire carrément ridicule, au premier abord. Sauf si je le fais en pleine conscience. En faisant abstraction du reste du monde, en me concentrant exclusivement sur mes sensations, le contact de la plante de mes pieds sur ce tapis végétal vivant, le silence, l’instant. En m’interrogeant sur la signification spirituelle et métaphysique de ce geste évident de reconnexion à la nature.

Là, bien ancré dans l’instant, la magie opère, l’acte prend tout son sens.

Physiquement, sensoriellement, métaphysiquement.

Et ça fait un bien fou.

 

Pierre-Yves Touzot

 

Pierre-Yves Touzot est réalisateur, romancier et blogueur. Dans ses romans, il invite ses lecteurs à s’interroger sur leur rapport à l’environnement, à se reconnecter à la Nature, une étape indispensable pour lui vers la résolution de nos problèmes écologiques. Depuis plusieurs années, il construit à travers son blog une médiathèque de romans, d’essais, de bandes dessinées, de films, de documentaires, tous consacrés à cette thématique. Pour en savoir plus : www.ecopoetique.blogspot.com

Après le roman Presque libre, coup de cœur de la rédaction Happinez, publié aux éditions La Trace, Pierre-Yves a publié un nouveau roman en mai 2023, également coup de cœur de la rédaction, Mon dernier concert

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