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De la fin de l’abondance à la sobriété heureuse…

Catégorie(s) : Nature, Philosophie, À découvrir, Rituels, Développement personnel, Bien-être, Art de vivre

Depuis la fin de l’été, nous sommes rentrés dans une ère nouvelle, celle de la fin de l’abondance. Un concept alarmiste qui, cependant, cache peut-être une vraie bonne nouvelle. Et si étions en train d’entrer, enfin, de manière discrète, sans en avoir l’air, dans une ère de décroissance ?

Cette fois-ci, nous sommes, officiellement, dans la fin de l’abondance.

Un mot signifiant, selon mon Petit Robert : quantité plus que suffisante, profusion. Cette même profusion qui fait tant souffrir notre petite planète.

Que nous enterrions lentement mais profondément l’idée même d’abondance me parait une très bonne nouvelle.

Je m’explique.

Depuis notre entrée dans l’ère industrielle et l’avènement de la société de consommation de masse, nous vivons dans l’idée que tant que l’on peut payer, on peut consommer. Que, quoiqu’il arrive, il y aura assez pour épancher toutes nos soifs, à condition d’avoir les moyens financiers.

Autrement dit, qu’une croissance infinie dans un monde fini est possible.

La fin de l’idée de l’abondance nous inviterait à considérer que peut-être, dorénavant, on ne pourra pas tout acheter, même si nous disposons de moyens illimités. Que nos ressources ne suffiront pas à calmer notre voracité. Que, peut-être, il n’y aura pas assez d’électricité pour tout le monde cet hiver, même pour ceux qui seraient prêts à l’acheter à prix d’or. Et que donc, face à cette possible (probable) pénurie, nous allons collectivement devoir nous montrer moins gourmands, plus raisonnables.

Plus sobres.

Au point de renoncer à la croissance ?

Autrement dit, d’entrer dans une phase de décroissance ?

Décroissance.

À titre personnel, le mot me va très bien.

Mais dès qu’il est prononcé, les dents grincent. Les esprits s’échauffent, les voix s’emportent. Le mot fait peur. Il ne devrait pas. On peut s’engager dans la décroissance en douceur. La mettre en place graduellement, l’expérimenter de manière constructive, organisée, sans pour autant revenir à l’âge de pierre. Ce retour à l’âge de pierre brandi par les adeptes de la croissance infinie comme la menace suprême en cas de changement de paradigme. À les entendre, aucune demi-mesure possible. Pourtant, il ne me parait pas totalement farfelu d’envisager de changer de façon de vivre sans pour autant devoir nous éclairer à la bougie. Contrairement à ce que ses détracteurs prétendent, décroissance ne signifie pas minimalisme forcené.

Il ne s’agit pas se priver de tout, mais de se contenter de moins.

Ok, le mot fait peur.

Changeons-le.

Remplaçons-le par d’autres appellations moins radicales, moins effrayantes.

Simplicité volontaire.

Sobriété heureuse.

Rationalisme.

Ou encore, plus simplement, diminution.

Du nombre de vêtements qui dorment dans nos penderies sans jamais en sortir. D’appareils électroménagers qui ne quittent nos placards de cuisine qu’une fois par an. Du nombre de degrés, la nuit, dans nos chambres à coucher. De mètres carrés de nos habitations. De chevaux dans les moteurs de nos voitures. De tout ce qui est superficiel, inutile dans nos vies. Passer de l’envie au besoin. Pratiquer le troc, l’échange, de biens et de services. Préférer la réparation au remplacement, la récupération au neuf.

L’art de la décroissance douce devrait être enseigné dans les écoles, en alternance avec des cours d’écologie. D’abord parce qu’il s’agirait d’une manière détournée d’enseigner le bon sens. Celui-là même qui sommeille plus ou moins profondément en chacun d’entre nous et que nous utilisons trop peu. Celui-là même qui nous dit qu’une baisse de la consommation de biens matériels aura pour effet mécanique la diminution de nos besoins en matière première, en énergie, pour la fabrication, le transport et le recyclage. Des arguments imparables, qui, si nous les acceptons et les mettons en pratique de manière concrète, agiront comme des remèdes efficaces contre notre éco-anxiété. Autant apprendre à vivre ainsi puisque, sauf miracle, bon gré mal gré, nous n’y échapperons pas.

Une décroissance économique qui pourrait s’accompagner, comme aime à le penser Aurélien Barrau, d’une croissance de bien être, de solidarité et de conscience.

Pierre-Yves Touzot

 

Pierre-Yves Touzot est réalisateur, romancier et blogueur. Dans ses romans, il invite ses lecteurs à s’interroger sur leur rapport à l’environnement, à se reconnecter à la Nature, une étape indispensable pour lui vers la résolution de nos problèmes écologiques. Depuis plusieurs années, il construit à travers son blog une médiathèque de romans, d’essais, de bandes dessinées, de films, de documentaires, tous consacrés à cette thématique. Pour en savoir plus : www.ecopoetique.blogspot.com

Il a récemment publié Presque libre, coup de cœur de la rédaction Happinez, aux éditions La Trace.

 

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