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Dans son nouveau livre “La posture juste”, Thierry Janssen nous montre le chemin vers la paix, la confiance et l’unité

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Beaucoup d’entre nous ont le sentiment, en traversant les nombreuses crises actuelles, d’être dispersés aux quatre vents, incapables de retrouver le minimum d’équilibre qui permettait de mener son existence dans un état – intérieure et extérieure – serein. Quelques jours seulement avant l’entretien live durant lequel Nathalie Cohen, rédactrice en chef du magazine HAPPINEZ, interrogera Thierry Janssen à l’occasion de la sortie de son livre La Posture juste (éditions l’Iconoclaste), l’ancien chirurgien devenu psychothérapeute, fondateur de l’École de la Présence thérapeutique et auteur de best-sellers comme La Solution intérieure, La maladie a-t-elle un sens ou encore Écouter le silence à l’intérieur, nous offre un généreux aperçu de ce nouveau guide que son approche globale de l’être humain et sa vision spirituelle de la société l’a amené à élaborer. Il nous y apprend comment déjouer nos comportements névrotiques et transformer leur logique délétère en nous connectant à la pure conscience et en explorant notre “corps-esprit” afin de trouver la posture juste, chemin vers la paix, la confiance et l’unité.

Happinez : Que doit-on comprendre dans l’idée d’une posture juste ?

Thierry Janssen : Il est important de faire la distinction entre les notions de justice et de justesse. La justice se définit par rapport à des lois qui entendent faire respecter le droit de chaque individu au sein d’une organisation sociale où la distribution des rôles a été convenue en vertu d’un projet commun. Elle sanctionne celui qui ne respecte pas les lois et elle demande réparation pour celui dont les droits n’ont pas été respectés. La justesse, quant à elle, est ce qui rend une personne ou une chose parfaitement adaptée à une situation donnée. Justice et justesse sont liées à l’intuition qu’il existe une vérité supérieure, un bien indiscutable. Le tout est alors de tenter de comprendre quelle est cette vérité, quel est ce bien. Nous avons tendance à affirmer que le bien est ce qui nous fait du bien – ce qui participe à notre confort et à notre survie. Lorsque la conscience s’éveille en nous, nous comprenons que le bien suprême est la Vie – ce qui participe au plein épanouissement de la Vie en nous et autour de nous, au maximum d’équilibre et d’harmonie.

La plupart du temps les décisions et les actions qui permettent de s’adapter parfaitement à une situation ne respectent pas forcément l’équilibre et l’harmonie de tout ce qui existe. Ce qui est juste pour certains ne l’est pas forcément pour d’autres. La justesse est donc une notion très relative. Toutefois la conscience éveillée nous montre qu’il existe une justesse absolue. On pourrait dire que la posture vraiment juste est l’attitude qui permet de s’adapter aux situations en agissant dans le respect de l’équilibre et de l’harmonie de la Vie en nous et autour de nous. Cette posture est à la fois énergétique, psychologique et physique. Être à ce niveau de justesse demande d’oublier notre intérêt personnel pour nous mettre au service de plus grand que nous, au service de la communauté des êtres humains, au service de tous les êtres vivants, au service de la nature dans son entièreté, en respectant la loi du moindre mal, en essayant d’abîmer le moins de potentiel et de vitalité en nous et autour de nous.

 

Quelle est selon vous la raison des crises individuelles et collectives que nous vivons ?

Toute crise comporte le danger de ne pas identifier les causes qui nous ont plongés dans le chaos et donc de nous y enfoncer plus profondément. Cependant, toute crise comporte aussi l’opportunité de comprendre ces causes et, de ce fait, d’assumer notre responsabilité en agissant autrement pour sortir du chaos et trouver un nouvel équilibre. Encore faut-il comprendre quelles sont les causes des crises auxquelles nous sommes confrontés.

Dans La Posture juste, je montre que le fonctionnement de notre personnalité est à l’origine de la plupart des crises auxquelles nous sommes confrontés. En effet, qu’elles soient physiques, psychologiques, sociales, économiques ou écologiques, les crises individuelles ou collectives sont le résultat des déséquilibres et des tensions créés par nos egos qui se croient séparés des autres et de leur environnement. En fait, tout vient de nos comportements névrotiques.

 

Qu’est-ce qu’un comportement névrotique ? Pourquoi avons-nous tant de mal à les modifier ?

La névrose – au sens où j’en parle dans le livre – est un processus qui met en place des comportements de survie destinés à nous éviter d’avoir à revivre les traumatismes et les peurs de notre enfance. Ces comportements ont la particularité de recréer ce qu’ils étaient censés nous permettre d’éviter. Ainsi, par exemple, notre peur de perdre le lien avec autrui nous amène à développer des stratégies pour ne pas perdre la connexion quitte à rechercher une fusion avec l’autre; à la longue ce dernier n’a pas d’autre choix que de s’éloigner de nous pour retrouver un peu de liberté et nous sommes alors confrontés à la perte de lien tant redoutée. La logique névrotique est implacable. Elle nous oblige à quitter l’illusion de nous croire séparés des autres et de notre environnement. C’est comme si la Vie, à travers la répétition de traumatismes et donc des crises de notre existence, nous amenait à refaire en conscience l’unité qui est son essence. Car la Vie n’est qu’au travers des liens sains et des interactions justes qui l’animent. Plus nous dépassons notre névrose, plus nous sommes en phase avec la Vie, ajustés à ce dont elle a besoin pour s’épanouir pleinement en nous et autour de nous.

Ce n’est pas simple car, à force de se répéter, nos comportements névrotiques finissent par être des conditionnements profondément inscrits dans les mécanismes de survie de notre cerveau reptilien. Nous avons beau nous raisonner, la volonté ne suffit pas. Nous nous croyons libres mais nous ne le sommes pas vraiment. Nous retombons facilement dans les pièges de nos conditionnements. La psychologie cognitive et comportementale affirme que l’on peut reprogrammer le cerveau en se remettant en situation, en conscientisant nos croyances et en choisissant d’expérimenter d’autres réponses. Personnellement, j’ai constaté que ce processus de libération est plus facile et plus rapide lorsque le corps est impliqué. Car chaque blessure, chaque peur induit des mouvements énergétiques accompagnés d’émotions qui se manifestent dans le corps. Souvent ces émotions sont inhibées dans les contractures musculaires qui changent la posture corporelle.

 

« Mieux qu’aimer ou ne pas aimer, soyons l’amour »

 

Comment mettre en place les conditions favorables afin que notre conscience puisse s’éveiller ?

La conscience peut s’éveiller en nous lorsque le mental est suffisamment apaisé. Le mental est l’ensemble des capacités cognitives produites par l’activité du cerveau. Le mental pense. La conscience ne pense pas, elle constate, tout simplement. La conscience dont il est question ici n’est pas la conscience intellectuelle qui permet de mettre des mots sur les expériences que nous faisons. Elle est ce que j’appelle dans le livre “la pure conscience”. Cette notion est difficile à appréhender par la neurologie ou par la psychologie qui s’intéressent à la conscience comme un produit de l’activité cérébrale. Elle ne peut se comprendre qu’au travers de l’expérience contemplative, lorsque le mental est profondément désactivé. Le meilleur moyen d’apaiser le mental est la méditation. Ainsi, pour répondre à votre question, les conditions les plus favorables pour que la pure conscience puisse s’éveiller en nous est de méditer régulièrement. Je dirais même de vivre notre existence comme une méditation dans la constatation et l’accueil inconditionnel de ce qui est.

 

Quelles sont les voies d’apprentissage proposées aux élèves de l’École de la Présence thérapeutique ?

L’École de la Présence thérapeutique (EDLPT) accueille des professionnels de la relation d’aide et de soin ainsi que d’autres personnes qui ont toutes l’intention de révéler ce qu’il y a de meilleur dans l’être humain et de se mettre au service de la Vie qui est en nous et autour de nous. Pour y parvenir, nous leur enseignons deux “outils”.

Le premier de ces outils est contemplatif : il s’agit d’une méditation que nous appelons la “plongée dans le silence intérieure”, dont la particularité est d’impliquer une profonde détente corporelle et mentale obtenue par l’ouverture du cœur. Il n’est pas seulement question de cultiver des pensées bienveillantes (ce qui est encore de l’ordre du mental) mais de détendre la poitrine et d’ouvrir le cœur physiquement, énergétiquement, de façon véritablement tantrique. Le tantra est constitué d’exercices physiques et méditatifs destinés à éveiller la conscience de l’énergie et stimuler l’énergie de la conscience. L’effet sur l’apaisement du mental est très puissant, il facilite grandement l’éveil de la pure conscience.  Cette pure conscience que nous pouvons appeler “l’esprit” (en français on confond souvent l’esprit avec le mental, c’est une erreur, en anglais le mental est le mind, l’esprit est le spirit). Ce premier outil d’éveil de la conscience est donc un outil spirituel.

Le second outil est psychologique. Il s’inscrit dans la lignée du travail psychocorporel développé dans les années 1930 par Wilhelm Reich, élève et dissident de Sigmund Freud, et plus tard par Alexander Lowen et John Pierrakos. Cette approche permet de percevoir les mouvements énergétiques qui accompagnent nos comportements névrotiques, d’identifier les changements de posture physique et psychologique liés à ces comportements, et, le cas échéant, d’opérer en conscience les ajustements qui permettent de revenir à ce que nous appelons “la posture juste”, cette posture à la fois énergétique, physique et psychologique qui permet de nous adapter aux situations en agissant dans le respect de la Vie en nous et autour de nous.

Cette approche autant psychologique que spirituelle révèle l’essentiel de l’être et transforme profondément la vie personnelle et professionnelle des élèves. Je suis très admiratif de constater l’engagement et le courage de toutes ces personnes qui viennent à l’EDLPT suivre le programme proposé sur trois ans. Cela me donne une grande confiance en l’être humain.

 

Quel message adresseriez-vous aujourd’hui à l’humanité pour qu’elle prenne pleinement acte des défis qui sont les siens dans cette première partie de 21e siècle ?

Je ne crois pas aux discours, aux idées prêchées, aux idéologies imposées. Je ne crois qu’aux actes concrets, à la puissance de notre présence. « Soyons le changement que nous souhaitons voir dans le monde » disait le Mahatma Gandhi. Nous voulons un monde plus juste, plus vivant et plus aimant. Alors adoptons une posture vraiment juste, soyons pleinement vivants, sans peur, avec confiance et joie, et aimons, acceptons ce qui est, ne le nions pas. Mais accepter ne signifie pas se résigner. Faisons quelque chose de plus juste, de plus vivant et de plus aimant avec ce qui est. Mieux qu’aimer ou ne pas aimer, soyons l’amour.

 

Y-a-t-il un enseignement précis à tirer de la crise de la Covid-19 ?

Cette crise sanitaire aujourd’hui planétaire m’apparait d’abord comme une crise de civilisation. J’ai bien dit “de civilisation”, c’est bien plus profond qu’une crise de société. Deux visions de la Vie et du monde se rencontrent et s’entrechoquent. D’un côté, il y a ceux qui, totalement pris dans les conditionnements de leur mental, considèrent la Vie comme dangereuse, refusent l’idée même de la mort et espèrent contrôler la Vie à l’aide de la technologie, quitte à s’empêcher de vivre pleinement et joyeusement. De l’autre, il y a ceux qui, en contact avec le silence et la paix de la conscience, acceptent la Vie telle qu’elle est, considèrent que la mort fait partie de la Vie au même titre que l’existence, font confiance aux ressources de bonne santé qui sont en nous et s’inquiètent lorsque la vitalité est brimée et la joie disparaît.

Ce que nous vivons est énorme, inévitable. Le monde qui nous attend est très différent de celui dans lequel nous avons vécu jusqu’ici. J’espère que La Posture juste guidera nos pas sur le chemin qui nous y conduit. C’est pour cela que j’ai créé l’EDLPT et écrit ce livre.

Pour suivre l’entretien live de Thierry Janssen et Nathalie Cohen, organisé par les éditions L’Iconoclaste et Happinez, sur le thème “Le sens des crises de l’existence : une occasion unique de se réajuster à la vie”, rendez-vous le jeudi 10 décembre 2020 à 20h sur Facebook : https://www.facebook.com/events/209108237389905?active_tab=about

 

Propos recueillis par Aubry François

Portrait © Thierry Balasse