Article

Contempler la vie avec émerveillement

Catégorie(s) : Développement personnel, Bien-être, Art de vivre, Philosophie, Rencontres, Sagesse & spiritualité, Livres, Rituels

Lorsqu’un quotidien bien rodé – si bien qu’il a peu à peu voilé à nos yeux toute l’intensité de la vie – se craquelle, que nous reste-t-il à faire sinon réapprendre à vivre ? Écrivaine passionnée par le voyage et le silence qu’offrent les grands espaces, Blanche de Richemont a publié il y a peu, chez Fayard, Le Sourire de l’aube. Elle nous présente ici ce roman tout désigné pour ceux qui ont perdu le contact avec la beauté des choses simples de l’existence, qui ne ressentent plus d’émerveillement face au rire d’un enfant ou ne contemple d’un cœur reconnaissant l’averse traversée par des rayons de soleil.

Happinez : Quel regard portez-vous sur la maladie dans ce roman ?

Blanche de Richemont : La maladie est considérée comme une épreuve initiatique. Elle force à chercher plus loin, ailleurs, autrement, des clés pour survivre, supporter, se réinventer puis se reconstruire. À l’image de toutes les épreuves, elle peut devenir une l’occasion de se réajuster et se tourner vers une vie qui nous ressemble plus. Quand on tombe malade, on peut essayer de guérir à tous les niveaux de son existence. Le sourire de l’aube raconte ce chemin, cette métamorphose. Peut-être que la vie nous convie sans cesse à un travail alchimique où l’on fait de la lumière avec de l’ombre. Mais cette histoire ne parle pas beaucoup de la maladie, elle évoque surtout ce qu’elle ouvre, ce qu’elle réveille chez les personnages qui sont tous bousculés, dérangés et donc surprenants. On ne sort jamais indemnes d’une maladie, on se retrouve blessés, renouvelés, éveillés, transformés, attristés, renforcés ou affaiblis. Et cela ne tient qu’à nous d’en faire quelque chose. On ne sort de toute façon jamais indemnes de la vie en général, elle vient toujours nous bousculer et c’est une merveilleuse nouvelle car elle ouvre sans cesse un champ de possibles.

 

Quelle rencontre va permettre à Camille de changer sa relation à la vie ?

D’abord la rencontre avec elle-même. Un jour, elle comprend qu’elle n’est pas la maladie, qu’elle ne correspond réellement à aucune définition dont elle s’affuble et qui l’enferme. Elle ressent qu’elle est beaucoup plus large que toutes les limites qu’elle appose à son être. Elle n’est ni jeune, ni belle, ni fatiguée, ni vieille, ni malade, elle est, tout simplement. Et cette sensation immense, presque vertigineuse lui offre une force de vie tout à fait nouvelle. Alors elle se réveille vraiment. Ses rapports à son mari, à sa fille, à son corps changent. Une autre vie commence. Elle rencontre un vieux monsieur, un sage anonyme, un voisin mystérieux qui l’initie aux secrets de la vie avec une immense simplicité et une joie confondante. Elle et sa fille entrent grâce à lui dans la magie du monde. Mais cela n’aurait pas été possible si elle n’avait pas d’abord fait ce chemin toute seule, si elle n’avait pas posé des actes forts qui la libèrent de ses chaînes. Il faut de l’espace pour que le mystère advienne. La rencontre avec le silence est aussi décisive dans ce chemin.

 

D’où vous vient cette sagesse de l’émerveillement face aux choses simples qui se présentent à nous dans l’instant ?

Dans mon roman, Camille découvre que le regard que l’on porte sur le monde est décisif. La capacité de s’émerveiller nous sauve du néant. Ce regard magique, poétique capable d’enchanter le monde, je l’ai moi-même découvert. Le sourire de l’aube est le fruit de vingt ans de quête dans le désert puis en Inde. Dans le Sahara où je vais encore régulièrement, j’ai découvert l’épure, la simplification et le silence. Quand on marche dans une terre vierge, le moindre signe de vie devient un miracle. Puis en Inde, auprès d’un sage, j’ai compris que nous étions sur terre pour trouver la joie et qu’elle peut se cueillir à chaque instant pour celui qui sait voir. Il s’agirait seulement d’être attentif à tout ce qui nous entoure. Dans Le sourire de l’aube, les personnages comprennent que lorsque l’on est capable de simplement sourire au jour qui se lève, sans raison, on a tout.

 

Propos recueillis par Aubry François

Portrait © Hannah Assouline