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Savourer la métamorphose – Les conseils santé du Dre V.

Catégorie(s) : Art de vivre, Nature, Philosophie, Sagesse & spiritualité, Rituels, Développement personnel, Bien-être

Chères lectrices, chers lecteurs, un temps se termine ici. Émue, je referme la fenêtre des chroniques en remerciant Happinez d’avoir ouvert ses pages à mon laboratoire intérieur. Il me faudrait sans doute, pour conclure à merveille, résumer les nombreuses réflexions partagées, et j’ai beau chercher, un seul mot me vient en tête: métamorphose.

J’ai stationné longtemps sur cette Terre, j’ai observé les hommes, les femmes, les fourmis et une grande partie du vivant, m’obstinant à résoudre un nombre incalculable de nœuds dont le fameux qui suis-je? ressassé, pétri, insoluble. Chercher son moi à l’intérieur de soi, arpenter ce chemin-là comme une évidence, se révèle être une impasse. Le moi, ici conçu en tant que centre — de l’âme, du corps, de la nature, du monde — prend la forme d’un objet nu, pur, vierge, authentique, détaché de la chair qui, en quelques sortes, serait un obstacle pour l’atteindre. Cette étrange logique qui place le moi dans l’humain, en fait le cœur, la vérité, son objectif ultime est peut-être le premier conditionnement que mes calculs et élixirs s’emploient désormais à secouer — puisque malheureusement la menace qui pèse sur tous les écosystèmes ne suffit pas.

Or mes recherches — l’ai-je raconté ici ? — ont débuté il y a de nombreuses années, à la lecture de La Merveilleuse Transformation et l’Étrange Nourriture Florale de la Chenille, composé par une savante née en 1647, Maria Sibylla Merian. À l’époque, j’étais convaincue que je pouvais fabriquer un breuvage permettant à l’humain d’avoir la puissance des chenilles, de voler après avoir rampé, de passer d’une existence à l’autre sans devoir mourir et renaitre. Le livre a bouleversé mes ambitions. Dans ce chef d’œuvre absolu, l’insecte étudié n’est jamais au centre de l’illustration. Maria représente les plantes qui le nourrissent, les vers, les oiseaux, les papillons, les mouches et quantités d’animaux en transformation, car elle avait déduit de ses longues observations que chaque vivant est un atlas où s’articulent une série de mondes, chacun peuplé d’une panoplie de formes…

J’ai alors compris une chose essentielle : comme la chenille, la forme humaine n’habite pas un territoire, elle en est la chair, la carte, le fragment, respire et se métamorphose avec lui, en lui. Elle porte en elle ses parents, grand-parents, mais aussi et avant tout les singes pré-humains, les poissons, les poules, les graines, les bactéries, les atomes de carbone, d’azote, etc. Tous les vivants constituent un même corps, une même vie et un même moi qui continue de passer de forme en forme, de sujet en sujet, d’existence en existence dans un même espace-temps. Cette vie est elle-même échappée d’un corps — le soleil— et engendrée par métamorphose de sa matière il y a 4,5 milliards d’années. Ainsi, chaque vivant est un petit morceau de soleil.

Par conséquent, pour trouver le moi, inutile de regarder au dedans de soi, et pour se transformer, inutile d’avoir des ailes ! Certains ont déjà compris qu’il suffit d’être né ou qu’il suffit d’observer tous les êtres nés, tous les vivants présents, passés, futurs; une chenille, une allée de platanes, un œuf. Pour ma part, j’aime attraper un peu de terre, caresser une fougère, peler une orange, toucher mon propre nombril en me remémorant l’extraordinaire aventure du soleil qui permit, un beau matin, la naissance de la vie, qui permit la métamorphose. Longue vie à vous,

 

Dre Vitale

 

Lisa Diez est une chercheuse polyvalente, sorte d’artiste tout-terrain. Plasticienne, clown, autrice, formatrice, elle ausculte sans relâche le vivant, le sensible, l’invisible en inventant des formes qui les relient. Promenez-vous sur son site, toujours en construction, www.atelierdiez.com

Photographie : © David Clode / Unsplash